Pages

«Je n'ai qu'une passion: celle qui me permet d'être libre sous le joug, content dans la peine, riche dans la nécessité et vivant dans la mort.» Giordano Bruno

mardi 5 juillet 2016

Un monde disparu

Lorsque je descends sur la rue Sainte-Catherine, plein de souvenirs me reviennent toujours en tête.

Je parcours la rue de Champlain jusqu'à Saint-Laurent, car c'était les endroits où je me tenais dans ma vingtaine.

Il y a de cela environ 20 ans, il y avait un paquet d'hôtels où on pouvait faire le party, c'est-à-dire fumer du crack, se saouler, faire des clients, y vivre sans payer tout de suite, etc. Mais tous ces hôtels que j'ai bien connus, certains assez beaux, d'autres, bas de gamme, ont disparu. D'ailleurs, on ne peut même plus fumer la cigarette dans les hôtels actuels, alors imaginez si on pourrait y fumer de la drogue... Avant, ces choses ne concernaient personne... maintenant, on se mêle de tout. On nous prend en charge comme des petits enfants, on veut notre sécurité, on veut notre bien... Hypocrisie.

Voici les noms de ces hôtels fameux où s'est déroulé une bonne partie de mon histoire lorsque j'étais à la dérive: le Jolicoeur, sur Ontario; le Kent, sur St-Hubert; le Sept Saisons, sur St-Hubert, un hôtel où j'ai vécu une année complète et suis parti sans payer mon bill de quelques centaines de dollars (le proprio a effacé la dette, faute d'argent); le Pigalle, sur Sainte-Catherine; et le fameux Boléro, sur Sainte-Catherine coin Saint-Laurent, un hôtel de passe qui remontait au moins aux années cinquante.

Tous ces hôtels ont disparu, et un monde aussi.

Parfois, quand je visite les lieux désertés du Village, j'aime me faire croire que je sors d'une prison où j'ai passé une vingtaine d'années, tellement c'est pas reconnaissable...

Alors que j'étais déjà en train de sortir du monde interlope, je sais qu'il y a eu un grand trou au niveau du tourisme, à cause de mauvaises décisions prises par la Ville de Montréal en rapport avec les événements et les festivals. Je sais que cela a occasionné beaucoup de faillites, surtout dans le Village, ça s'est mis à tomber comme des châteaux de cartes. Ajoutez à cela la mort de «Normand», l'ex-policier qui avait La Track, Le Bourbon, Le Drugstore, le Club Sandwich et j'en passe, il avait en fait tout un pan du Village sur le côté sud de la rue Sainte-Catherine dans le Village, et si je parle de son décès, c'est parce que cela a entraîné la faillite de tous ses commerces, et le résultat est qu'aujourd'hui le Village est un village fantôme.

Ajoutez à ce gros morceau, la fermeture du K.O.X, à cause d'un stupide règlement municipal, et vous voyez le portrait. J'ai eu le bonheur de connaître ce bar avant qu'il ne ferme, et croyez-moi, ça en valait vraiment la peine. C'est là que j'ai rencontré un jeune travesti (que j'ai pris au début pour une femme) et que ma vie a changé. J'ai réalisé aujourd'hui à quel point ce travesti m'avait aimé, et d'ailleurs, moi aussi à l'époque j'étais fou amoureux. En fait, les deux on s'aimait énormément, intensément, comme deux jeunes dans la vingtaine, cependant cet amour était empoisonné par le crack. Je me souviens qu'on fumait beaucoup, toutes les nuits, après quelques heures à tapiner, et le lendemain il nous restait un peu d'argent pour s'acheter des cuisses de poulet. Pendant qu'on fumait on devenait comme «de glace» l'un envers l'autre, tellement obsédés par la drogue, et ça me faisait chier, mais j'étais dorénavant accro moi aussi et je devais dealer avec cette situation weird et pas voulue, qui me rendait vraiment triste, car c'était comme si la vie de notre relation s'envolait tranquillement, en fumée... Et je sentais littéralement cette «vie à nous deux», cette connivence, sortir hors de moi à chaque puff de crack, et ça me tuait, ça me faisait mal. Et ironiquement, je me suis retrouvé, avec lui, dans l'impasse de fumer cette drogue pour geler le mal que cette drogue nous faisait.

Ce bar était vraiment le seul endroit où les travestis draguaient librement, tout cela mélangé avec les «vraies» femmes et les hétérosexuel(les), et on pouvait aller aux toilettes autant du côté des hommes que des femmes, j'aimais beaucoup d'ailleurs aller dans la toilette des femmes avec les femmes, tout simplement parce qu'elles étaient belles, sans toujours savoir si on avait affaire à un travelo, et les toilettes étaient grandes, superbement décorées, et «ouvertes»: il n'y avait pas de porte d'entrée. J'aimais beaucoup cette liberté et cette grande tolérance. Tout le monde était gentil dans ce bar, chaque client semblait dans le coup, semblait comprendre où il se trouvait et comment se comporter.

On fumait en gang, la nuit, autour d'une table, vers 4 heures du matin, après avoir fait une razzia de clients. Et je me souviens, le stock était très fort, le plus fort et le meilleur que j'ai jamais vu par rapport à ce que j'ai connu par la suite. Un avocat nous vendait ça chaque nuit dans sa BMW. C'était ça l'«époque».

Les hôtels, les travestis, le crack, les clubs, la vie insouciante.

La menace du sida planait dans l'air, mais comme tout jeune de vingt ans, j'étais trop timide pour forcer les gens à se protéger, ou me protéger moi-même. Je me fiais à mon flair et à ma bonne étoile, et celle-ci m'a très bien servi: je n'ai jamais attrapé aucune maladie, et je ne sais pas encore aujourd'hui, franchement, comment cela fut possible. Je couchais vraiment avec toutes sortes de monde, presque au hasard, tellement ma libido était généreuse et explosive.

Mon histoire a commencé avec l'album Achtung Baby de U2, que j'écoutais quotidiennement alors que j'étais nouvellement en amour avec mon travelo. D'ailleurs, il y a une toune sur cet album qui fait directement allusion à ça, je crois que c'est «Even better than the real thing», mais disons en général que tout l'album pue la drag queen.

Quand j'ai voulu accepter le travesti que j'aimais «en homme», j'ai cru que j'étais gai (on voulait me faire croire que c'était irréversible une fois qu'on avait commencé à coucher avec les hommes), et cela pendant plusieurs années, jusqu'à ce que je rencontre une femme dans un bar une nuit d'hiver, et que je la fourre. Mon retour à la vie hétérosexuelle commençait à s'opérer, et je me suis aperçu que je ne pouvais aimer vraiment qu'une femme. C'est pour ça que ç'avait marché avec mon travesti: c'est parce qu'il était déguisé en femme, avec des manières de femme. Autrement, un homme tout cru avec des muscles, du poil et des formes carrées, ça ne me disait absolument rien: c'était aussi excitant que si j'avais regardé un pan de mur.

J'ai vécu avec ma gang qui me faisait fumer non-stop, parce que l'argent coulait à flots; j'essayais d'en sortir avec mon travesti, mais il en était incapable, et c'est comprenable. Il n'avait pas fini l'école, n'était pas capable d'y retourner (on a essayé), et ne pouvait pas travailler en tant que travesti (il voulait vivre en femme), à part pour faire la rue. Dans cette situation sans issue, il ne restait que la drogue, le fun, le sexe et l'oubli. Notre amour a mangé des volées, au fil du temps. Parce que la prostitution et la drogue, ça finit par te foutre en l'air une relation. Quand ton travesti rentre pas parce qu'elle a un client qui a trop de dope sur lui, ça te fait chier en sacrament. Pis tu sais pas ce qui se passe. Ça créé des froids, des trous émotionnels, pis on commence à aller voir ailleurs, et ça devient une guerre mutuelle sur ce point-là, et tranquillement ça se fissure, l'amour se brise, on devient plus dur, plus endurcit, le romantisme se ramasse poké.

Quand j'ai voulu devenir plus indépendant, j'ai commencé à faire des clients moi-même, sur la rue Champlain, et pour des agences d'escortes, ça marchait pas mal mes affaires, car j'étais beau bonhomme, et cela m'a amené éventuellement à vendre de la coke par un contact.

Quand j'ai commencé à vendre, j'ai arrêté progressivement de faire des clients, car j'avais un bon afflux d'argent et de crack.

Dans toute mon histoire, je tiens à dire que je n'ai jamais passé une nuit à dormir dehors: je me suis toujours organisé pour trouver un endroit où dormir, les rares fois où je n'en avais pas.

Quand je circule au centre-ville aujourd'hui et que je me regarde passer dans la glace d'une vitrine de magasin avec mon allure vive et allumée, je constate immédiatement ma différence d'avec tous les junkies crottés qui traînent dans les rues: je ne suis pas de cette race-là.

Il y a deux types de personnes dans les consommateurs: ceux qui en consommant se dégradent et dégénèrent au fil du temps, parfois très rapidement, et les autres, ceux qui restent pareils, peu importe ce qu'ils font, ils gardent toujours un «maintien». Par exemple, même lorsque j'étais à fond dans la drogue, je veillais toujours à avoir des fringues neuves et propres, je veillais à ma propreté physique, à ma sécurité, je veillais à ma santé et à ma forme mentales. Il y a peut-être aussi en partie une question de chance là-dedans, car si j'étais tombé malade tôt, j'aurais peut-être dégénéré comme certains, mais pour ceux-ci, je dois dire aussi, qu'on ne sait pas s'ils sont tombés malades après ou avant leur descente, ou même, s'ils sont vraiment malades, parce qu'ils en ont l'air.

D'après moi, c'est cela qui fait en partie la différence entre les individus: certains ne se respectent pas assez et se détruisent trop. Moi j'ai toujours veillé à me garder un fond d'énergie vitale, et quand je n'étais plus capable, je partais tout simplement. Je me sauvais, même si je le regrettais par la suite. Je m'enfermais de force pour ne pas aller rejoindre le champ de bataille de la drogue. Ça ne durait jamais vraiment longtemps, mais ça me laissait le temps de récupérer.

Beaucoup des personnes que j'ai connues sont devenues itinérantes, ont été atteintes du sida, se sont suicidées. Moi-même j'ai tenté plusieurs fois d'en finir.

J'ai passé plusieurs fois près de la mort, mais incapable de prendre une solution définitive (genre me pitcher en bas d'un immeuble), j'ai choisi de mener une vie suicidaire.

Je vivais chaque jour comme le dernier... Ce fut une époque marquante de ma vie.

Aussi, quand j'aimais, c'était à corps perdu évidemment. Tout était sans limites.

Quand je me souviens de cette époque, je n'ai étrangement que de beaux souvenirs...

Je regarde le monde aujourd'hui désolé que j'ai connu, et je me dis que les choses ont bien changé...

Avant, on pouvait se promener sur certaines rues, ou des petits chemins entre les immeubles dans Centre-Sud, et trouver un vendeur de crack avec sa cohorte de clients. D'ailleurs, on avait qu'à suivre de loin de par les rues quelques fuckés pour finir par trouver le vendeur. C'était le bon temps. Aujourd'hui, il n'y a plus rien de tout cela. Les fuckés sont bien en vue sur la rue Sainte-Catherine, ils sont tous à moitié morts, et ils ne vont nulle part.

La police a fait du trop bon boulot. En fait, avec les nouveaux règlements municipaux très coercitifs, les prostituées ne peuvent plus circuler sur la rue dans un quadrilatère déterminé une fois prise (sinon, elle s'en va immédiatement en prison) et les vendeurs de came se sont tous fait coincer comme des rats. Plusieurs points de vente de drogue qui existaient depuis longtemps se sont retrouvés «brûlés» sans possibilité de retour.

La conséquence, selon moi, fut une détérioration de la qualité de la drogue. Les gangs bien structurés décimés, la prise en main de ce marché par les gangs de rue anarchiques a définitivement amené de la mauvaise came sur le marché. J'ai refait le test quelques fois au fil du temps il y a quelques années et je peux confirmer que la drogue est aujourd'hui très mauvaise à Montréal. C'est peut-être une des raisons qui expliquent pourquoi les junkies du centre-ville sont si maganés, et si rapidement. La came qu'ils consomment contient peut-être 10% de cocaïne ou d'héroïne, le reste étant des produits chimiques quelconques plus ou moins dangereux. Ce qui fait qu'ils doivent en acheter plus pour se satisfaire, doivent donc s'appauvrir, et que leur santé se dégrade rapidement à cause de la grande quantité de produits de coupe inconnus. Les junkies d'aujourd'hui sont très miséreux, parce qu'ils sont incapables d'avoir satisfaction, qu'ils sont très pauvres, très malades, et se retrouvent souvent en prison, ce qui aggrave leur dégradation.

Avant on trouvait de la drogue dans les bars, dans les hôtels même... Aujourd'hui, tous ces endroits de vente de bonheur artificiel ont été bustés, et rebustés... Résultat: le trafic étant de plus en plus difficile, risqué et moins payant, et la drogue étant de qualité douteuse, puisque le peu de coke qui réussit à rentrer à cause de la répression policière doit être coupé à 90%, les consommateurs se tournent vers les médicaments de prescription, qui eux, au moins, ont le mérite d'être contrôlés et donc purs.

Par contre, ces médicaments sont des opiacés très puissants, et qui maganent donc beaucoup. D'où le fait qu'on ne sort pas du problème: les junkies sont réduits à l'état de zombies ou de loques humaines et sont à jamais incapables d'avoir aucun «maintien».

Pour ma part, je n'ai jamais été attiré par les opiacés ou tout ce qui endort, et je n'ai donc jamais consommé d'héroïne et je ne me suis jamais piqué non plus avec quoi que ce soit. Je n'en avais pas besoin, le crack fumé était apparemment aussi fort qu'un shoot.

Dans le fond, quand je me compare avec la situation d'aujourd'hui, je me suis beaucoup lamenté sur mon passé, mais je me dis que je suis chanceux d'avoir vécu mon trip à cette époque.

C'était le bon temps, en effet...

Même si j'en ai braillé une crisse de shot...


 
Un des vidéos que j'aimais écouter souvent quand j'étais à l'hôtel Sept Saisons...

20 commentaires:

  1. Tout un récit! J'en ai lu des trucs sur le monde de la rue, souvent écrits par des illettrés ou, pire encore, des poseurs. Tu supplantes bon nombre d'écrivains qui se prétendent déjantés et bon nombre de témoins qui n'ont malheureusement pas le goût des lettres. C'est encore mieux que "Roman avec cocaïne" de M. Aguéev (pseudonyme d'un certain Mark Lévi). Si tu rassemblais les récits de cette période en un roman, je ne sais pas si tu ferais un tabac. Mais je suis certain qu'il se trouverait au moins cent personnes pour ne jurer que par ce qui deviendrait leur roman-culte. Ton talent littéraire est indéniable peut-être parce que tu es une vieille âme. La densité de ton vécu ça ne peut ni s'imiter ni se feindre. Si j'étais éditeur, ce sont des types comme toi que je recruterais avec l'impression d'avoir embarqué Wayne Gretzky dans mon équipe.

    RépondreEffacer
  2. La drogue est certainement de + en + mauvaise à peu près partout sur le globe -
    M^me le haschich qui est une drogue très simple et naturelle -
    Ici en France nous en sommes très près des pays producteurs , mais non , on a bien du mal à trouver du bon haschich , plutôt en général coupé avec un tas de saloperies chimiques qui font déplaner et rendent malade !
    Quelle tristesse pour cette bonne drogue qui avait des parfums et des effets si savoureux !
    Je pense que la lutte contre la drogue est une perversité extrême -
    Pour faire court : les pouvoirs libéralistes combattent la drogue non par posture morale mais par ce que sa clairvoyance est susceptible de démasquer leurs manigances -
    M^me l ' alcool , m^me ici en France , pays de très bons vins , ils le combattent -
    Mais maintiennent leur accès de riches à ces drogues ( on le voit bien pour la coaïne ) -
    D ' où leur double ( ou triple ) posture de répression et de tolérance des trafics :
    - s ' en mettre plein les poches
    - abrutir les consciences par des drogues dangereuses , dénaturées -
    - interdire le + possible les drogues / le problème étant qu ' ils ne peuvent pas l ' interdire tout à fait car ils en seraient privés aussi -
    Ce que je dis des drogues vaut certainement aussi pour le sexe - Wilhelm Reich en a très bien parlé -

    RépondreEffacer
  3. P-ê était-ce le bon temps car tu ne te souciais de rien, tu "trippais", tu baisais quand tu voulais (et même plus). Je savais que tu t'étais déjà prostitué mais pas que tu avais eu une liaison avec un travesti. Ce qui fait de toi un queer comme Queer de Pirate ? hihi....merci pour cette tranche de vie, moi j'ai rien à raconter, mariée à 20 ans, pas de drogues, pas d'amants, rien.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Je n'ai jamais compris ce que voulais dire le terme de «queer»... et il est probablement superflu d'en savoir le sens exact... les gais et lesbiennes font trop de distinctions, je trouve. Mais il faut dire que les sexologues et les psychologues doivent y être pour quelque chose aussi. Par exemple, moi je suis un fétichiste des pieds de femme. Je n'aime pas particulièrement les chaussures, je n'aime pas les pieds qui sont de couleur différente que blanc, et j'aime sans bronzage puisque j'adore voir les petites veines bleues et vertes, je n'aime pas tous les pieds, même s'ils sont de femmes blanches, j'aime le cutex mauve, mais pas violet, et c'est aussi le seul cutex que j'aime, sinon je préfère absolument sans cutex et j'aime les ongles très courts, j'aime les couleurs orangées, jaunes, rouges, roses sur les talons et la plante, s'il n'y a pas de couleurs, je n'aime pas le pied, j'aime une certaine forme de pied, mais pas les autres, j'aime m'imaginer qu'il sent un peu, ça m'excite davantage, etc.

      Y a-t-il un nom pour tout ça? Est-ce suffisant si on dit tout simplement que je suis «fétichiste des pieds»? Je ne crois pas, puisque c'est très imprécis. Mais cela ne sert à rien de détailler et de mettre un nom sur tout ce qu'on aime, puisque ça pourrait changer, l'infinité de la beauté nous réserve toujours des surprises.

      Doit-on appeler un homme qui aime les seins pointus de femmes blanches, mais avec de gros mamelons, un «fétichiste des seins»? Je suis certain que n'importe quel sein ne fait pas l'affaire de tous les hommes: beaucoup aiment un certain type de sein, et pas d'autres. Est-ce normal? Qui sommes-nous pour dire que ce n'est pas normal ou que c'est bizarre?

      Effacer
    2. Je me souviens que Sartre avait dit que nous sommes des êtres sexuels de part en part. Cela m'a fait comprendre une chose: c'est qu'il n'y a pas de limites à l'érotisme. La beauté est partout, mais souvent nous n'en voyons que des parties, ou nous ne la voyons pas, nous voyons la laideur à la place. Les choses qui sont belles peuvent devenir laides, et les choses qui sont laides peuvent devenir belles. Cela dépend de notre interprétation du moment. Il y a peut-être des failles dans ce que je dis, mais c'est l'impression que j'ai.

      Par exemple, les immeubles aliénants construits en Allemagne après la Deuxième Guerre, et que tout le monde déteste, je les trouve beaux. Comment expliquer cela? Je semble voir la beauté là où personne ne la voit...

      Je les trouve probablement beaux parce que je les trouve parfaits dans leur fonction aliénante.

      Effacer
    3. Pour revenir aux seins, certains hommes sont capables de se masturber et de jouir cela en regardant cette partie du corps, ils n'ont pas besoin d'autre chose, eh bien moi je suis capable de faire la même chose, mais avec les pieds de la femme, s'ils sont de mon goût. Je dois spécifier aussi que si la femme n'a pas de beaux pieds, c'est un turn-off dans une relation. C'est donc un élément très important pour moi, mais en même temps je ne regarde pas que ça... Je serais donc sous-déterminé si on disait que je suis regardant seulement de cette partie du corps ou de cette partie de l'individu. L'esprit de la femme m'excite aussi. Suis-je un «fétichiste de l'esprit» pour autant?

      On voit facilement que dès qu'un désir s'écarte de la norme imbécile du troupeau, il est qualifié de «fétichiste». C'est pourquoi je ne tombe pas dans ce jeu des qualifications multiples. Un homosexuel, peut devenir queer, puis trans, et ensuite lesbienne trans, puis homme en femme ou femme en homme, et finalement devenir straight.

      Pour ma part, je suis aujourd'hui dans la réalité straight. Mais mes fantasmes ne sont pas «straight», puisqu'ils ne sont pas soumis à la réalité, il se passe donc ce que je veux dans mes fantasmes: c'est la liberté absolue, comme dans «Les 120 journées de Sodome» du Marquis de Sade.

      Est-ce normal? Suis-je satisfait que je ne puisse pas réaliser tous mes fantasmes? Mais qui a dit qu'il fallait réaliser tous ses fantasmes pour être heureux? Par exemple, si le fantasme d'un homme c'est de se faire bouffer vivant par un autre homme, comme c'est arrivé en Allemagne, faut-il qu'il le réalise absolument? Personne n'a jamais dit qu'il fallait répondre à tous ses instincts ou à tous ses désirs. Cela n'a pas de sens, en effet.

      Pour ma part, j'ai pris conscience que mes désirs ne sont pas réalisables dans la réalité, car ils le sont par définition: dès qu'un fantasme se réalise dans la réalité, ce n'est plus un fantasme, et cela devient une autre région morte du fantasme, peut-être temporairement. La nature fonctionne comme ça: elle nous détourne de ce qui nous attire trop pour nous diriger ailleurs: elle répartit ses forces. Car il ne faut jamais oublier que nous faisons partie de ce grand ensemble qu'est la Nature. La Nature veut s'aimer elle-même dans toutes ses parties.

      Dès que nous réalisons un fantasme, il n'est plus aussi attrayant. Par exemple: j'ai énormément envie de coucher avec cette très belle femme, mais lorsque je le fais, ce n'est pas aussi bon que je me l'imaginais. Ou bien, c'est très bon, mais plus je lui fais l'amour, moins c'est excitant, moins c'est bon... Que se passe-t-il? Je suis en train d'abuser d'une des beautés de la Nature, elle me détourne donc vers autre chose en me la rendant moins attrayante, moins intéressante.

      C'est ce que je crois. C'est pourquoi je crois à la mesure aussi. Il ne faut pas abuser des bonnes choses, car elles deviennent alors mauvaises, et les fantasmes doivent rester des fantasmes la plupart du temps et servir plutôt de moteur au désir dans la réalité.

      L'homme, comme son désir, ne peuvent être satisfaits.

      Platon le disait déjà: l'amour est un tyran. Il nous domine, et nous ne pouvons jamais en être satisfait.

      C'est ce qui garantit le mouvement dans la Nature, la Vie, car un homme «satisfait» est un homme mort.

      Effacer
  4. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

    RépondreEffacer
  5. du cutex mauve pas violet, voilà ce qui me manquait.

    RépondreEffacer
  6. heureusement que BED est pas là, elle dirait t'es juste un fucké Daniel Steel....avec 3-4 :D

    RépondreEffacer
  7. Je suis le gars le plus normal et le plus tranquille du monde.

    Bois pas, fume pas, sort pas, mange bio, marié et fidèle, qu'est-ce tu veux de plus? :D

    RépondreEffacer
  8. toi marié ? Avec la fille avec qui tu sortais au bon temps de ce blogue? Ou c'est une autre de tes farces plates hihi

    RépondreEffacer
  9. Ouep,,, j'avais promis après 10 ans,,, :D

    RépondreEffacer
  10. BED a lu mon texte, elle aime,,, elle fait juste sa furtive,,, :D

    RépondreEffacer
  11. tu la connais notre BED,,,

    moi ses textes me manquent,,,

    RépondreEffacer
  12. Autre pan des annales d'un surnageur étonnant au coeur à la bonne place que j'aime lire. Merci de raconter.

    RépondreEffacer
  13. Merci à tous pour vos éloges, ça me donne du courage. Je suis en train de travailler sur un projet d'écriture, complètement différent, mais dans lequel on arrivera, je l'espère, à me reconnaître.

    RépondreEffacer